Territoire jusqu’ici peu exploré par la recherche sur la Shoah, le grand-duché de Luxembourg est un pays dont le statut pendant la Seconde Guerre mondiale et la relation avec sa minorité juive sont très particuliers. Au carrefour de la France, de la Belgique et de l’Allemagne, près de cinq mille Juifs y vivaient avant l’invasion allemande du 10 mai 1940 et moins d’un millier revinrent après la guerre.

Refuge pour de nombreux exilés d’Allemagne et d’Autriche au cours des années 1930, le pays est envahi le 10 mai 1940. Le 2 août, une administration civile est mise en place sous l’autorité du gauleiter Gustav Simon, afin de préparer l’annexion du territoire au Reich. Soucieux de susciter l’adhésion de la population, Simon veille à la promotion de la Volksgemeinschaft et à l’exclusion des autres populations, à commencer par les Juifs. Ceux-ci sont poussés au départ ou déportés, leurs biens confisqués et aryanisés. En juin 1943, le septième et dernier convoi de déportation quitte Luxembourg-ville.

Au lendemain de la guerre, alors que se construit partout en Europe la mémoire du génocide, rien n’est entrepris au Luxembourg où aucun monument public n’évoque la persécution des Juifs. Le tournant de 2015 et les excuses présentées par l’État à la communauté juive impulsent une nouvelle dynamique à cet aspect.

Ce numéro explore les complexes rouages de ces multiples processus, rigoureusement organisés par la machine administrative nazie. À la lumière des dernières recherches apparaissent les modalités de l’exclusion et de la dépossession, les structures de concentration de la population juive et sa déportation, ainsi que le difficile retour des survivants et l’élaboration d’une politique mémorielle.

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